Lors de la dernière réunion, la Direction a répondu à une question sur le harcèlement en terminant par, je cite, "Comme vous le voyez, la liste des actions entreprises est longue. Il s’agit de prévenir les comportements inappropriés plutôt que guérir, si tant est que ce terme soit approprié."
La CGT va donc revenir sur cette réponse.
La Direction a cité différents points. Je les listerai différemment puisque l'employeur a une obligation générale de sécurité et dans le cadre de l'article L4121-1 du code du travail, une obligation d'information, de formation et de traitement. C'est dans cet ordre que je vais citer à nouveau les réponses de la Direction. Je vais donc commencer par le cinquième et terminer par le premier point.
La question à se poser est "est-ce que toutes les mesures dont le Groupe a connaissance sont prises ?"
La présente intervention sera limitée. Pour celles et ceux que cela intéresse, vous pouvez aller voir les procès-verbaux des CHSCT auxquels de nombreuses réponses n'ont pas été apportées, vous pouvez aussi aller voir les réclamations en délégation du personnel ou en commission des réclamations sociales ; par exemple la réclamation sur la « culture du viol ». Dans cette optique, je n’ai regardé que trois textes : la convention OIT 190 (Organisation Internationale du Travail) sur la violence et le harcèlement, la recommandation OIT 206 sur la violence et le harcèlement et enfin l’accord relatif au harcèlement et à la violence au travail, AFB du 17 juin 2011. D'’autres textes fournissent d’autres éléments qui ne sont pas ou peu appliqués. Dans les textes visés, la CGT n’a pas nécessairement repris l’ensemble des points.
La première thématique est donc l’obligation d’information.
Selon vous, le 5ème point cité est « sur l'intranet, nous avons une rubrique prévention et lutte contre les comportements inappropriés. »
Nous n'avons toujours pas de mesures sur le harcèlement, il y a bien un fourre-tout mais pas de section harcèlement.
Par ailleurs dans cette partie, on retrouve la notion de connotation sexuelle. Je rappelle que pour la CGT, le cul est à connotation sexuelle ; pour le Groupe - à la lumière faite par Frédéric OUDEA, Directeur Général, et Caroline GUILLAUMIN, DRH, le cul n'a aucune connotation sexuelle. Nous laissons le lecteur de ces lignes apprécier le sérieux de la Direction Générale et du Groupe sur le sujet.
Votre 6ème point était « Il existe également un guide opérationnel élaboré à l'intention des RH intitulé : agir contre les comportements inappropriés, harcèlement et agissements sexistes. »
Avant de le critiquer, peut-on l’avoir ? Normalement, il devrait être en annexe du DUER…mais compte tenu de la faible gestion de ce document, j’ai un doute !
Votre 7ème point était « Il y a régulièrement des communications sur le sujet à l'intention des ambassadeurs, des RH et des collaborateurs. »
Le message est vide de sens. On revient sur l'ambivalence déjà évoquée dans cette instance, sans réponse de la part de la Direction. Depuis juillet 2020, le point est régulièrement évoqué par la CGT avec le silence pour seul réponse.
Votre 8ème point est « Une vidéo résume l'essentiel de la nouvelle procédure d'alerte et des traitements des cas. On me dit qu'il existe des films de sensibilisation « les voix intérieures », Ben et Elena*, illustrant ce que peuvent être les situations de comportements inappropriés en milieu professionnel. »
A la fin de la vidéo d’Elena, il est mentionné que ce genre de comportement peut avoir de graves conséquences. La question qu'il faut se poser est pour qui ? La CGT rappelle ici que les graves conséquences sont plutôt pour les victimes que pour les auteurs de manière générale. Pendant l'enquête, les victimes colatérales sont la présumée victime, le présumé auteur, les témoins - qui nous expliquent qu'ils ne veulent plus jamais vivre ça -, les experts, les RH, etc.
Il existe aussi d'autres victimes qui n'enclencheront aucune procédure, ne diront rien : les prestataires, les intérimaires, les personnes à des postes trop importants pour évoquer ce genre de point.
Selon les textes cités en début d’intervention, il manque pour la Convention 190 de l’OIT et sans être exhaustif, par exemple
- Les explications sur les lieux où le travailleur est payé, prend ses pauses ou ses repas ou utilise des installations sanitaires, des salles d’eau ou des vestiaires à l’occasion de déplacements, de voyages, de formations, d’événements ou d’activités sociales liés au travail ; dans le cadre de communications liées au travail, y compris celles effectuées au moyen de technologies de l’information et de la communication ; pendant les trajets entre le domicile et le lieu de travail. Tous ces lieux sont potentiellement lieux d’harcèlement,
- identifier, en consultation avec les organisations d’employeurs et de travailleurs – à savoir les élus ! les modalités de travail qui exposent davantage les travailleurs et autres personnes concernées à la violence et au harcèlement,
- prendre des mesures pour protéger ces personnes de manière efficace,
- de tenir compte de la violence et du harcèlement, et des risques psychosociaux qui y sont associés, dans la gestion de la sécurité et de la santé au travail,
- d’identifier les dangers et d’évaluer les risques de violence et de harcèlement, en y associant les travailleurs et leurs représentants, et de prendre des mesures destinées à prévenir et à maîtriser ces dangers et ces risques,
- de fournir aux travailleurs et autres personnes concernées, sous des formes accessibles selon le cas, des informations et une formation sur les dangers et les risques de violence et de harcèlement identifiés et sur les mesures de prévention et de protection correspondantes.
Pour la recommandation de l’OIT, il manque des guides et autres moyens d’information mis à disposition ; des services de conseil et d’information fournis, selon le cas, d’une manière qui soit accessible ; des permanences téléphoniques 24 heures sur 24 ; des soins et traitements médicaux ainsi qu’un soutien psychologique ; la sensibilisation aux effets de la violence domestique ; des campagnes de sensibilisation, qui attirent l’attention sur le caractère inacceptable de la violence et du harcèlement, en particulier de la violence et du harcèlement fondés sur le genre, s’attaquent aux comportements discriminatoires et préviennent la stigmatisation des victimes, des plaignants, des témoins et des lanceurs d’alerte.
Pour l'accord AFB, nous pouvons relever
- Alerter sur les facteurs, les comportements pouvant conduire à des situations de harcèlement ou de violence au travail,
- Inviter à la vigilance l'ensemble des salariés, y compris l'encadrement et les représentants du personnel et en particulier les membres du CHSCT et le personnel des services de ressources humaines et de santé au travail,
- Être attentif au développement de comportements inacceptables notamment par un détournement du pouvoir d'organisation du travail,
- Informer sur les mesures de prévention et les dispositifs d'accompagnement des salariés victimes,
- Accompagner, par une communication adaptée, les changements profonds de l'entreprise, tels que les fusions/absorptions ou les restructurations,
- Réunions d'information/de sensibilisation à destination des différents acteurs (membres des services de santé, personnel des services de ressources humaines, représentants du personnel, personnel d'encadrement, autres membres du personnel) qui peuvent être animées par le personnel des services de santé et des ressources humaines ou par des intervenants externes qualifiés,
- Cette problématique peut également être évoquée lors des visites médicales périodiques ou effectuées à la demande du salarié ou de l'employeur,
- Lors de toute modification importante de structure : au-delà du dialogue social avec les instances de représentation du personnel, l'entreprise est invitée à dispenser une information adaptée à destination de l'encadrement et des salariés,
- L'entreprise informe les représentants du personnel des moyens mis en œuvre ; cette information contribue à promouvoir les méthodes de prévention de ces phénomènes,
- En outre, l'AFB va mettre à disposition des entreprises de la branche une brochure élaborée, après échanges avec les partenaires sociaux.
Sur la thématique de la formation,
Votre mesure 3, « Un e-learning destiné aux experts et au RH est obligatoire : agir contre les comportements inappropriés, harcèlement et agissements sexistes. Il porte plus précisément sur la phase d'écoute. » C’'est sans doute là que né le concept du harcèlement sans victime.
Pour le 4ème mesure, "Il y a eu un e-learning obligatoire destiné à l'ensemble des collaborateurs : agir contre les comportements inappropriés, harcèlement et agissements sexistes. Contrairement à l’e-learning précédent, il portait sur les fondamentaux de cette action."
C'est la fameuse formation à l'image sexiste. La CGT a interpellé la Direction sur sujet les 27 septembre 2021, 30 novembre 2021, 14 décembre 2021, 27 juin 2022, 12 juillet 2022. A ce jour, il n'y a pas de réponse et la formation n'est pas modifiée. Il y a eu également des réclamations en commissions des réclamations sociales sans plus de succès.
C'est aussi cette formation qui est introuvable dans MyLearning. Cela a été expliqué en commission des réclamations sociales. Sûrement la preuve d'une grande importance!
Selon les textes visés, nous pouvons ajouter un certain nombre de mesures.
Pour la recommandation 206 de l'OIT, la CGT peut relever sans être exhaustive la création de programmes visant à agir sur les facteurs d’aggravation des risques de violence et de harcèlement dans le monde du travail, y compris la discrimination, les abus liés à des relations de pouvoir et les normes de genre et les normes culturelles et sociales qui favorisent la violence et le harcèlement ; la création de lignes directrices et des programmes de formation tenant compte des considérations de genre.
Pour l'accord AFB de 2011, il manque
- Contribuer à la compréhension des phénomènes de harcèlement et de violence au travail en les explicitant (définition, identification, …),
- Former progressivement les différents acteurs et en priorité le personnel d'encadrement pour leur permettre de prévenir, d'identifier, de comprendre, de gérer les phénomènes de harcèlement et de violence au travail et d'assister les personnes qui en sont victimes,
- Afin d'aider l'encadrement à anticiper et prévenir ces situations, à adopter la posture managériale appropriée, les entreprises adaptent leurs formations managériales en intégrant des éléments leur permettant d'appréhender les situations de harcèlement et de violence au travail ainsi que leurs conséquences,
- Par ailleurs, le cadre juridique, l'identification des manifestations et la compréhension des mécanismes du harcèlement et de la violence au travail, l'analyse des situations, la mise en œuvre des mesures nécessaires seront présentés aux acteurs concernés,
- Les entreprises associent aux actions de formation le médecin du travail et les autres membres des services de santé, selon des modalités qui leur sont propres,
- L'AFB attire l'attention du CFPB sur le contenu des actions de formation destinées au personnel d'encadrement en lien avec cette problématique."
Par ailleurs, on pourrait revoir ce que la CGT avait évoqué en CHSCT, les 2 heures d'écoute au catalogue de formation. La situation a évolué dans le catalogue Groupe : il n’y a plus de formation à l’écoute en 2022.
La Direction a également oublié de répondre à la demande de formation sur les zones sexuées notamment à la Direction Générale. Cela n'est pas vieux, cela date de juillet dernier !
La troisième thématique est le traitement des plaintes. C’est votre pierre angulaire et régulièrement le seul sujet abordé pour certains…
Selon votre premier sujet, « Il y a déjà une procédure interne de signalement et de traitement des comportements inappropriés pour SGPM. Il existe plusieurs possibilités pour signaler un comportement inapproprié : via Whistleblowing, via un signalement auprès de la RH, via un signalement auprès de la hiérarchie ou du médecin du travail ou de l'assistant ou assistante sociale ou du représentant du personnel qui contacte alors la RH. »
Nous n'allons pas nous étendre, la CGT vous renvoie au sujet du droit d'alerte et à la dénonciation de faits de harcèlement lors d'un CSE précédent sans réponse à ce jour. Cette procédure a déjà fait l'objet de nombreuses critiques de différentes organisations syndicales. Elle n'est toujours pas applicable ni adaptée. Elle devrait être confidentielle, impartiale et indépendante. Elle n'a aucune de ces trois caractéristiques.
Votre second point était "Il y a eu la création d'une communauté d'experts formés en matière de lutte contre le harcèlement et les agissements sexistes animée et supervisée par un référent pilote."
Si ce n’est pas dans la formation RH que c’est expliqué, la genèse du concept du harcèlement sans victime est née ici.
Sur cette thématique, nous pouvons ajouter, selon les textes évoqués :
Pour la convention 206,
- garantir que des politiques pertinentes traitent de la violence et du harcèlement ;
- adopter une stratégie globale afin de mettre en œuvre des mesures pour prévenir et combattre la violence et le harcèlement ;
- établir des mécanismes de contrôle de l’application et de suivi ou renforcer les mécanismes existants ;
- garantir l’accès à des moyens de recours et de réparation ainsi qu’à un soutien pour les victimes ;
- prévoir des sanctions ;
- élaborer des outils, des orientations et des activités d’éducation et de formation et sensibiliser, sous des formes accessibles selon le cas ;
- garantir l’existence de moyens d’inspection et d’enquête efficaces pour les cas de violence et de harcèlement ;
- d’adopter et de mettre en œuvre, en consultation avec les travailleurs et leurs représentants, une politique du lieu de travail relative à la violence et au harcèlement ;
- garantir que tout travailleur a le droit de se retirer d’une situation de travail dont il a des motifs raisonnables de penser qu’elle présente un danger imminent et grave pour sa vie, sa santé ou sa sécurité, en raison de violence et de harcèlement, sans subir de représailles ni autres conséquences indues, et le devoir d’en informer la direction ;
Pour la recommandation 206,
- une indemnisation appropriée du préjudice ;
- les frais de justice et les dépens, conformément à la législation et à la pratique nationales ;
- un traitement des cas efficace et en temps voulu ;
- des conseils et une assistance juridiques pour les plaignants et les victimes ;
Pour l’accord AFB de 2011
- Des procédures appropriées sont mises en place au sein de l'entreprise afin de permettre à toute personne, pensant de bonne foi soit être victime ou soit être témoin de tels actes, de pouvoir s'exprimer ;
- Toute démarche effectuée par l'employeur, que ce soit lors d'un signalement ou d'une enquête, est menée avec la plus grande discrétion. Tout signalement s'accompagne d'une garantie d'anonymat tant à l'égard du salarié qui alerte que des personnes potentiellement concernées (« les supposés agresseur et victime »). Si des investigations sont nécessaires, elles sont menées avec toutes les précautions requises, et notamment dans la plus grande confidentialité ;
- Les partenaires sociaux tiennent également à rappeler que toutes les parties doivent bénéficier d'une écoute impartiale et d'une équité de traitement ;
- Lorsqu'un salarié dépose une requête ou effectue un signalement, sa réclamation, qui doit être étayée par des faits caractérisés, est instruite sans retard,
- Chaque signalement fait l'objet d'un examen attentif ;
- Par ailleurs, tout salarié ayant été victime d'une dénonciation calomnieuse doit également bénéficier des mêmes mesures d'accompagnement.
Les CSE ont l'obligation de désigner un référent. Voir la réclamation CGT du 12 juillet 2019 à laquelle la Direction n'a même pas pris la peine de la remettre dans un compte-rendu.
Outre les trois thématiques classiques, nous pouvons ajouter d’autres points non traités dans l’entreprise, sans être exhaustif :
Pour la convention et la recommandation de l’OIT
- promouvoir la reconnaissance effective du droit de négociation collective à tous les niveaux comme moyen de prévenir la violence et le harcèlement et d’y remédier et, dans la mesure du possible, d’atténuer l’impact de la violence domestique dans le monde du travail ;
- soutenir cette négociation collective en recueillant et en diffusant des informations sur les tendances et les bonnes pratiques concernant le processus de négociation et le contenu des conventions collectives ;
- des modalités de travail flexibles et une protection pour les victimes de violence domestique ;
- une protection temporaire des victimes de violence domestique contre le licenciement, selon qu’il convient, sauf pour des motifs sans lien avec la violence domestique et ses conséquences ;
- la prise en compte de la violence domestique dans l’évaluation des risques sur le lieu de travail ;
- une indemnisation appropriée du préjudice.
Pour l’accord de 2011, certains indicateurs sociaux tels que, par exemple, un taux de fréquence des arrêts de travail, un turn-over, anormalement élevés, peuvent contribuer à retenir l'attention des employeurs sur l'existence de tels comportements.
On peut aussi ajouter par exemple les vacances des experts et / ou le manque d'effectifs. Vous nous avez présenté un dossier où le signalement se fait le 10 décembre et la première écoute le 7 janvier. Les délais annoncés devaient finaliser la phase d’enquête !
Vous avez terminé par "Comme vous le voyez, la liste des actions entreprises est longue. Il s’agit de prévenir les comportements inappropriés plutôt que guérir, si tant est que ce terme soit approprié."
Pour la CGT et compte tenu de ce qui vient d'être dit, nous sommes loin du compte. Nous pourrions ajouter
- la prise en compte des mesures proposées dans l'enquête sur les violences sexistes et sexuelles de 2021, où un lien évident entre attribution du bonus et harcèlement sexuel est fait ;
- il n'y a aucune retour d'expérience sur les cas traités pour les éviter. Ces mesures devraient être dans le DUER ;
- 21% des salariés se disent victimes de violences et cela n'émeut pas lors de la restitution du baromètre employeur ou collaborateur bref le baromètre.
La CGT rappelle que le code de conduite devrait être appliqué par tous, y compris et surtout par la Direction.
Nous sommes fin 2022, depuis 2011, la Société Générale sait parfaitement que toutes les mesures dont elle a parfaite connaissance ne sont pas prises. La réponse à la question initiale "est-ce que toutes les mesures dont le Groupe a connaissance sont prises ?", la réponse est non.
Souhaitons qu'en 2023, la politique du Groupe évolue significativement en la matière. Comme nous sommes en période d'évaluation, l'évaluation sur cette thématique est « non encore maîtrisé ».