LE ROUGE ET LE NOIR
Est-ce un effet du quarantenaire de Mai 68, on se serait parfois cru à la Sorbonne des grands soirs, la nuance de taille étant que Dany était cette fois le contesté. Donc, invité omniprésent de ce grand moment de solidarité entre les destinataires et les créateurs du dividende, Kerviel a fait évidemment l'essentiel des questions et des aigreurs. Rassurons-nous, on n'en était pas aux demandes physiques, panem et circenses dans sa version du dividende et des têtes, s'est limité à réclamer le départ de Bouton, de Mustier, la saisie des salaires futurs de Kerviel, et une sévérité accrue dans le profilage des promotions, avec bien entendu les analyses puissantes du genre « y’a des complicités », « on l'a arrêté seulement quand il allait trop loin », « c'est un bouc émissaire » etc… Un type, se référant à Sarkozy, réclamait le départ de Bouton au nom des grands principes. Un autre, applaudi d'ailleurs, a dénoncé la stratégie d'indépendance, qui ne sert ni l'actionnaire ni le personnel. Quand même, en pleine AG, ça fait chaud au cœur de voir le débat atteindre ce niveau d'altruisme ! Il y a même eu une, mais une seule, intervention sur le montant des gros bonus distribués aux traders, qui pourraient être une des causes du problème. Et les subprimes dira-t-on ? Il n'en a pas vraiment été question. Quelques allusions protestataires, mais rien de méchant puisqu'on ne peut pas désigner un, ou des coupables, qui offriraient leur tête en rédemption du péché commis envers l'actionnaire. Cette contestation n'a heureusement touché à rien d'essentiel : après s'être donné le frisson pendant quelque temps, on a vite retrouvé les vraies valeurs puisque les résolutions sont passées avec les scores habituels (entre 73 et 99 %). Pour passer au chapitre des choses sérieuses, on retiendra les interventions d'Oudéa et de Foltz. Le comité spécial, présidé par Foltz, en est resté à son rapport, sans s'interroger sur les liens entre les mécanismes de la fraude et la recherche du profit maximum à court terme, et pour cause, ou sur le décalage entre les volumes d’opérations et les effectifs du contrôle à OPER. On notera quand même qu'il a réclamé un meilleur équilibre entre Front, Middle et Back Offices, par un renforcement des moyens, de l'indépendance et de l'autorité des seconds. Ce n'était toutefois pas la dominante du dit rapport, axé plutôt sur les responsabilités individuelles. Pointant la faiblesse des contrôles et les responsabilités de la hiérarchie, on a aussi entendu que les procédures étaient respectées, mais que les gens n'allaient pas chercher au-delà. C’est plus commode que d’admettre l’insuffisance chronique des moyens des Back Offices donc la responsabilité de la direction. L'essentiel, c'est quand même ce qu'a dit Oudéa qui faisait là ses premières armes. Concernant la BFI d'abord, il a fait remarquer que 2/3 de son activité était l’accompagnement des clients et que c'était d'abord là que se situait son expertise, juste remarque. Il a réaffirmé la solidité du "business model" de la SG, refus de la croissance pour la croissance (entendez par là les mariages), recherche prioritaire du développement indépendant et autonome, souci de la diversification, baisse de l'allocation de capital à la BFI et à BDDF au profit des "relais de croissance", (réseau international, services financiers, gestion d'actifs), plan d'économie - les 1 G€ dont la DRH nous disait qu'ils n'étaient qu'une annonce aux marchés - continuation des recrutements, tels furent les pistes stratégiques. Au final, on remarquera qu’aucun actionnaire ne s’est plaint d’avoir empoché de gras dividendes les années précédentes malgré les risques pris par la BFI… et que personne n’a dit non plus qu’une moindre prise de risque devrait conduire à un rendement du capital moins important. Pire, Dany a même promis un rapide retour à 20% de R.O.E. !
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