DE CHARYBDE EN SYLLA ?
La démission de Daniel Bouton est donc censée apporter de la « sérénité » pour la Société Générale et son personnel. Si c’était le cas, ce serait très bien, mais ce n’est pas vraiment ce qui se profile. Assaillis par la presse, les représentants syndicaux ont été priés de manifester bruyamment leur satisfaction, comme si ce départ allait tout régler d’un coup de baguette magique. Dès l’aube de l’annonce, la CGT au contraire s’inquiétait de la période d’incertitude qui s’ouvre, quoi qu’en dise le communiqué lénifiant du Directeur Général. Si l’on s’en tient à son message donc, il va « poursuivre à tirer les enseignements de la crise » avec le nouveau président… sauf à parler de lui à la 3ème personne, ce ne peut qu’être un membre actuel du conseil pour être désigné le 6 mai. Notre sort dépendrait donc d’une décision du Conseil d’administration, juste avant que Frédéric Oudéa reçoive les syndicats à 17h. Ce conseil aurait déjà des favoris, et quels favoris ! D’abord le retraité de Peugeot Citroën, Jean Martin Folz, jusqu’à présent celui qui préside le comité des rémunérations du conseil, et qui décida de l’attribution des stock-options auxquelles Daniel Bouton renonça finalement. Folz, par ailleurs Président du club très fermé des très grandes entreprises privées, récidivait quelques jours plus tard dans les Échos sur une pleine page, justifiant autant ses rémunérations astronomiques que celles de ses petits camarades. Logique, ce lobby est parmi les plus acharnés opposants à une limitation de la rémunération des dirigeants. Ensuite Luc Vandevelde, viré de chez Carrefour, surnommé l’exécuteur de Marks et Spencer, dont le départ fut à chaque fois copieusement indemnisé… au point que les syndicats britanniques l’avaient comparé aux cochons qui engraissent sur le gazon anglais, une insulte chez nos cousins d’outre-Manche. Autrement dit des experts en déontologie dont la légitimité, plutôt l’illégitimité à remplacer Daniel Bouton ne fait aucun doute ! De quoi inquiéter, et le pourquoi du communiqué intersyndical : « Les organisations syndicales … tiennent à réaffirmer sans ambiguïté qu’elles n’accepteront pas que ce départ soit le prélude à une prise de contrôle de la Société Générale ou à une restructuration brutale qui menacerait l’emploi des salariés. De plus, ce départ ne résout pas les questions en débat avec la Direction Générale notamment : la cession de la gestion d’actifs au Crédit Agricole, la stratégie 2009, les rémunérations ». Frédéric Oudéa conclut son message par un appel à la solidarité dans la période difficile que nous traversons ! Parlons-en justement, solidarité bien ordonnée commence par la préservation de l’emploi des salariés du groupe, donc son indépendance, donc son intégrité. Il serait donc bienvenu, puisque nouveau Président il y a, que celui-ci prenne des engagements immédiats au plus vite, avant même l’assemblée des actionnaires du 19 mai. Le premier projet sur la table est celui de la cession de SGAM à CAAM. L’expertise mandatée par le CCUES fait clairement apparaître que SGAM est un maillon d’une chaîne dont l’intégration au groupe est stratégique, depuis la gestion d’actifs jusqu’à la conservation (SGSS) et que la gestion « classique », l’essentiel de l’activité de SGAM, a démontré sa capacité d’être parmi les meilleurs en 2008. La solidarité du groupe s’exprimera donc bien mieux en abandonnant le projet de cession. Voilà une décision que les salariés considéreraient comme une preuve concrète de cet engagement de solidarité.
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