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Interview d'Hugo, "ex CDN" ... et déjà perdu dans les méandres SG - 29 Mars 2023


Interview un an après la bascule des fonctions supports et des premières équipes centrales du groupe CDN

Alors que depuis quelques jours, les salariés de certaines filiales du groupe CDN ont basculé dans le système informatique SG, le renfort des compagnons a tenté d’apporter l’aide nécessaire, mais force est de constater que la plupart des équipes sont à bout et épuisées.
Nous avions pourtant alerté la direction, dès le début, des effets prévisibles que l’hémorragie des effectifs pouvait avoir sur les étapes jugées décisives de Vision 2025.
Au-delà du constat, nous avons récemment exigé de P. Aymerich qu’il tienne compte des premiers enseignements et qu’il revoie sa copie – notamment sur les suppressions de postes attendues par la direction dans le cadre de Vision 2025. (cf nos 3 alertes lors de la réunion du 8 Mars 2023)
Près d'un an après la bascule des fonctions centrales et des équipes supports du CDN dans les services centraux parisiens, il y a aussi nécessité de tirer quelques enseignements.
Cet interview fera office de "Speak up" et pourrait permettre d’améliorer significativement le suivi des collègues récemment incorporés dans les effectifs SG.

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CGT SG : Bonjour Hugo et merci d’avoir accepté cet échange. Pouvez-vous présenter votre parcours au sein du Crédit du Nord ?
Hugo : Je suis arrivé au Crédit du Nord (CDN) il y a une quinzaine d’années. J’ai commencé mon premier poste dans un service où je suis resté 6 ans. Je gérais les relations pour mon activité aussi bien en interne qu’en externe au CDN. Ça a été mon meilleur poste car c’était un poste très complet avec beaucoup d’échanges, de communication et d’autonomie. J’avais de très bons responsables hiérarchiques. C’était une belle expérience.

CGT SG : Pouvez-vous nous expliquer ce que vous entendez par autonomie dans votre poste ?
Hugo : Nous avions de l’autonomie principalement parce que l’on avait une bonne vision sur tout le process, du début jusqu’à la fin. Nous comprenions bien ce que nous faisions, le comment et le pourquoi. Nous ne faisions pas une tâche sans savoir à quoi cela servait.
En 2014, après 6 ans dans mon premier poste, l’activité a été externalisée vers une autre société à Nantes. Dans le service, certains salariés sont partis à la retraite, d’autres ont été reclassés. La direction du CDN a voulu conserver un petit noyau pour assurer un certain niveau de contrôle et pour gérer des flux entrants et sortants ainsi que pour la comptabilité. Je faisais partie de ce petit noyau de 4/5 salariés. On n’avait pas trop le choix. On te disait, « vous allez faire ceci et cela et point », vous n’aviez pas votre mot à dire. Je leur avais quand même dit que je voulais changer après 6 ans sur le même poste. Le contenu du poste avait drastiquement changé, autant changer d’activité et aller découvrir un tout autre domaine. Mais on ne m’avait pas laissé le choix. Je suis resté dans ce petit noyau pendant deux ans. J’ai ensuite fait plusieurs postes au CDN jusqu’à l’annonce de Vision 2025.

CGT SG : Pendant ces années au CDN, estimez-vous avoir été bien accompagné par la RH dans votre parcours professionnel ? Nous avons entendu dire par d’autres salariés du CDN que, jusqu’à présent, lors de la mise en mobilité « la RH du CDN s’occupait de tout » et qu’elle proposait des postes…
Hugo : Peut-être, mais ça doit dépendre pour qui. Dans mon cas, lors de l’externalisation de mon activité, j’avais demandé à changer de poste mais je n’ai pas eu le choix. J’avais rencontré la RH à plusieurs occasions mais je ne me suis pas senti épaulé dans mes démarches. Les postes que j’avais eus, c’était moi qui étais allé à la pêche.
Pour résumer ma trajectoire au CDN, j’ai très bien commencé avec un poste intéressant, un management efficace et bienveillant, le travail était reconnu et récompensé… puis ça s’est dégradé au fur et à mesure en fonction de la qualité de la ligne hiérarchique. Aujourd’hui je termine la période CDN sur une note de déception.

CGT SG : Comment avez-vous appris la nouvelle du projet Vision 2025, c’est-à-dire pour ce qui vous concerne directement de l’absorption du CDN par la SG ?
Hugo : On avait appris l’annonce de la fin du CDN par la presse, on était tous sous le choc. Puis la Comm avait fait passer un message pour dire qu’elle allait organiser des réunions extraordinaires pour faire le point. Chacun des services avait son point avec le big chef qui disait : « Ne vous inquiétez pas, ce n’est pas du tout une absorption », « C’est un mariage » nous disait-on. Sous-entendu, un événement heureux, la joie… « Il n’y pas lieu de s’inquiéter, vous allez être bien reçus, il n’y aura pas de pertes collatérales… ». Un vrai conte de fée. D’ailleurs, aujourd’hui encore, ils sont restés dans ce registre même si, parmi ceux qui tenaient ce type de discours, certains sont dans des placards. Tout le monde peut constater aujourd’hui qu’il s’agit d’une absorption pure et simple. Compte tenu de toutes les difficultés que nous rencontrons pour avoir une visibilité sur ce que nous allons faire à la SG, et toutes les barrières que l’on nous met sur le chemin, on peut dire que c'est la majeure partie des salariés du CDN qui paient la facture de la fusion et ils n’ont absolument aucun mot à dire. Si on te dit d’aller là, tu devras aller là.

CGT SG : Côté SG, lors des annonces, on avait droit à un discours de la direction qui présentait l’absorption comme « Une fusion qui verra naître le meilleur des deux mondes »
Hugo : Ils se sont éclatés en communication ! Au fond nous savions tous que l’opération est purement économique.

CGT SG : Au-delà des premières heures de l’annonce et de la mise en place de la fusion, comment étiez-vous informés et accompagnés pour la suite ?
Hugo : Nous avons été comme lâchés dans la nature. La RH du CDN a organisé des points carrières dans lesquels nous n’apprenions pas grande chose pour ne pas dire qu’ils ne servaient à rien. Je pense que son but était de cocher une croix dans une case pour qu’elle puisse dire qu’elle avait fait un truc. Par la suite, la RH était abonnée aux absents. On avait beau lui envoyer une quantité de mails, on n’obtenait aucun retour.
Du côté de la ligne hiérarchique, les managers disaient qu’ils étaient au même niveau d’information que nous, c’est-à-dire qu'ils n’en avaient aucune.

CGT SG : Et pendant ce temps-là, on se rapprochait de la date de fusion du 1er janvier 2023. Comment avez-vous su ce que vous alliez faire à la SG ?
Hugo : A un moment donné, nous avons reçu un papier, un avenant à notre contrat, nous indiquant où nous devrons aller et ce que nous ferons sans aucune forme de discussion préalable, ni explication.

CGT SG : A cette occasion, à la CGT SG, nous avons été alertés par vos collègues dont certains, qui se trouvaient à Anjou,  étaient priés de se rendre à telle date dans une entité située à l’autre bout de Paris. Sans aucune explication sur les activités de l’entité et peu de choses sur le poste à prendre. De plus, la direction avait juste oublié de mentionner que les salariés ont, dans ce cas, une possibilité de recours et de signaler leur désaccord sur l’affectation proposée. Nous sommes intervenus auprès de la direction pour leur rappeler les engagements qu’ils ont signés avec nous. Nous avons alors écrit un tract sur la possibilité de contester la proposition d’affectation de la direction et nous l’avons distribué devant l’immeuble CDN de la rue d’Anjou. Nous l’avons fait pour rappeler aux salariés leurs droits et pour les inviter à nous contacter en cas de nécessité.
Hugo : En effet, nous n’avions aucune connaissance sur les recours possibles puisque, depuis les annonces, la RH CDN a fermé boutique, on n’avait plus de nouvelles.

CGT SG : Si la RH CDN n’était pas disponible avant la fusion, qu’en est-il de la RH de la SG depuis le 1er janvier 2023, date à partir de laquelle vous êtes devenu salarié de la SG ?
Hugo : J’ai rencontré une fois ma RH SG. C’était un entretien tout à fait classique. Elle avait mon CV. On avait discuté de mon expérience et de ce que je voulais faire… etc. Dans notre discussion je lui ai fait comprendre que je n’avais pas envie de poursuivre l’activité que j’avais faite depuis les quatre dernières années au CDN. Avant l’annonce de la fusion, j’avais déjà exprimé mon souhait de changer d’activité lors de mon prochain changement de poste. Chez CDN, on change de poste tous les quatre ans.

CGT SG : Actuellement quel poste occupez-vous ?
Hugo : Actuellement, je continue à faire ce que je faisais au CDN. Mon nouveau manager m’a dit qu’il a besoin de gérer les activités en extinction de CDN, mais cela ne devrait pas dépasser les six mois ou un an tout au plus.

CGT SG : Votre poste n’est donc pas pérenne.
Hugo : Je suis dans une situation assez bizarre, je ne fais pas partie de l’équipe car mon activité est entièrement tournée vers le périmètre du CDN tandis que le reste de l’équipe est sur le périmètre de la SG. Malgré moi, je ne me sens absolument pas concerné par les sujets échangés lors des réunions d’équipe. Et effectivement, après le travail de nettoyage post bascule que je fais actuellement, je ne sais absolument pas ce que je vais faire par la suite.

CGT SG : Comment êtes-vous accompagné dans la recherche de votre futur poste ?
Hugo : Je ne suis pas accompagné par qui que ce soit. Comme j’ai été mis en mobilité, je vais sur la bourse des emplois, je regarde des postes qui peuvent m’intéresser. Mais j’ai du mal à me représenter concrètement la description du poste et parfois j’ai même du mal à déchiffrer l’intitulé du poste. Et d’après les retours de certains de mes collègues, je ne suis pas seul dans ce cas.
Cependant comme je sais assez précisément ce que je veux faire, j’ai sélectionné et postulé à plusieurs postes. J’ai reçu deux réponses négatives. Pour d’autres, je n’ai pas eu de retour. J’ai également eu un contact intéressé par mon profil pour un « Vis ma vie » mais après m’avoir fait attendre plus de deux mois et après plusieurs relances de ma part, on avait fini par me dire qu’on n’était plus intéressé par mon expérience, sans me donner aucune raison. Je n’ai pas apprécié cette manière de faire.

CGT SG : Idéalement quel accompagnement proposeriez-vous à la SG pour vous aider à intégrer ses structures et vous permettre de retrouver une trajectoire professionnelle que vous estimez normale ?
Hugo : Tout d’abord je voudrais que l’on fasse le nécessaire pour obtenir des explications lorsqu’on refuse une candidature pour un poste. Ensuite que l’on me fasse des propositions en fonction de mon profil et de ce que je souhaite faire. Pour l’instant je dois me débrouiller seul sans repère et avec très peu de retours utiles ou constructifs.

CGT SG : Avez-vous une vision sur la situation des collègues CDN qui arrivent à la SG ?
Hugo : Nous sommes dispatchés un peu partout, on ne se voit pas fréquemment mais lorsque j’ai eu quelques nouvelles, ce sont un peu les mêmes sons de cloche pour tous. C'est-à-dire, ce sont des personnes qui se retrouvent dans des postes qui ne les intéressent pas beaucoup ou qui sont dans des voies sans issue, voire parfois même dans des placards. Ce sont des gens, qui comme moi, occupent un poste mais qui sont quand même à la recherche d’un autre poste et il n’y a personne pour les guider dans cette recherche. On a même des collègues à qui l'on a donné des postes qui sont prévus pour être délocalisés, des postes fantômes en somme.
Depuis l’annonce de la fusion, nous passons de l’inconnue à l’inconnue !
On peut dire que, par rapport au discours qu’ils nous ont tenu lors de l’annonce et ce qui nous arrive réellement, c’est le jour et la nuit. « Vous serez bien accueillis » disaient-ils.
Je n’attendais pas que l’on nous accueille avec l’orchestre mais juste un petit mot de bienvenue et un véritable accompagnement dans notre recherche de poste lorsque c’est nécessaire.  Au lieu de cela, on nous a dit, tel jour tu viens à tel endroit et tu te connectes. On vient ensuite te dire, sans te laisser le choix, que tu feras ceci ou cela.
Voilà la situation dans laquelle beaucoup de collègues CDN se retrouvent aujourd’hui.

Presqu’une année après les premières annonces individuelles des transferts, les sujets ne manquent pas. Globalement, nous avons pu apporter beaucoup de conseils individuels et effectuer des interventions pour que les difficultés trouvent des solutions convenables pour les salariés concernés. Des discours rassurants à la réalité, il y avait un pas que nous avons souvent dû aider à passer, malgré le manque de réactivité de la direction.