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La secrétaire générale de la Fédération des cadres CGT (Ugict) Sophie Binet, 41 ans, est devenue, à la surprise générale, secrétaire générale de la CGT, première femme à occuper ce poste depuis la création de l'organisation en 1895.

A peine l'annonce de son élection, Sophie Binet a entonné avec la salle le chant des militants de la fédération Mines Energie : "Emmanuel Macron, si tu continues, il va faire tout noir chez toi." Elle précise qu'elle se rendra à Matignon avec l'intersyndicale pour rencontrer la Première ministre Elisabeth Borne le 5 avril "pour exiger le retrait" de la réforme des retraites, "de façon ferme et déterminée".

 

C'est une figure du combat contre le contrat premier embauche

Sophie Binet, 41 ans, est une ancienne membre du syndicat étudiant Unef et du Parti socialiste. Elle milite à gauche depuis ses 15 ans selon un portrait des Inrocks en 2016. Elle a été l’une des figures de la lutte contre le contrat premier embauche (CPE), quand elle était étudiante en philosophie à l’université de Nantes. Elle avait protesté au côté de Sacha Houlié député de La République en Marche dans la 2e circonscription de la Vienne et Stéphane Séjourné, le secrétaire général de Renaissance. À l’époque, en 2006, elle avait répondu à 20 Minutes à des internautes sur les raisons du mouvement.

Dix ans plus tard, avec la militante féministe Caroline de Haas, Sophie Binet est à l’origine de la pétition contre la loi travail : "#LoiTravailNonMerci". Cette pétition avait atteint des records et dépassé en 2016 le million de signatures.

 

Elle a été CPE dans un lycée des quartiers Nord de Marseille

Elle a été conseillère principale d'éducation (CPE) dans un lycée professionnel au Blanc-Mesnil en région parisienne et dans les quartiers nord de Marseille. "J’ai fait le choix de ce métier car je trouvais que notre société était trop compartimentée, trop sclérosée, qu’elle s’enfermait. Cela m’a ouvert les yeux, et ouvert sur le monde", raconte la syndicaliste dans une interview au site Regards.

 

Elle était à la tête de la CGT des cadres

La nouvelle patronne de la CGT connaît bien les arcanes du syndicat, dont elle a gravit les échelons petit à petit. Depuis 2018, elle dirigeait l’Ugic-CGT, la branche des ingénieurs, cadres et techniciens, qui revendiquait 78.386 adhérents en 2019. Après un technicien de la métallurgie (Philippe Martinez), un ancien chaudronnier-soudeur (Thierry Lepaon), la CGT aura à sa tête une ancienne représentante des cadres, qui a "une bonne connaissance de l’industrie à sa tête"comme l’écrit l’Usine Nouvelle.

 

L’égalité femmes-hommes est sa priorité

Sur le plateau de BFM TV, lors d'un débat de la réforme des retraites le 9 mars, elle argumentait en faveur de l'égalité salariale. Puis, dans le débat qui s'en suit, elle tient tête à l'économiste Elie Cohen qui s'illustre par son paternalisme.

Le 15 février 2023, elle prenait la parole à une soirée organisée par le journal Politis à Paris pour comprendre les conséquences de la réforme des retraites pour les femmes. Quelques heures plus tôt, elle participait à un happening devant l'Assemblée nationale pour dénoncer les inégalités salariales entre hommes et femmes avec un chèque géant, au côté de la député Sandrine Rousseau et du collectif Nous Toutes.  L'égalité salariale libérerait 5,5 milliards d'euros de cotisations pour financer le régime général des retraites.

 

Elle lutte contre les violences faites aux femmes au travail

En plus de sa fonction de référente du collectif "femmes mixité" à la CGT pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles au travail, Sophie Binet est membre du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes. En 2019, Sophie Binet a également coécrit le livre "Féministe, la CGT ? Les femmes, leur travail et l’action syndicale", avec la syndicaliste Maryse Dumas et l'économiste Rachel Silvera.

Dans une tribune publiée dans le journal L’Humanité, Sophie Binet regrettait, cinq ans après le début de libération de la parole avec #MeToo, le manque d’avancés dans le monde de l’entreprise contre les les violences sexistes et sexuelles : "En cinq ans, la conscientisation féministe a fait un pas de géant. Mais les institutions n’ont malheureusement pas suivi, notamment au travail. La grande majorité des entreprises n’ont ni plan de prévention ni protocole clair. Les professionnel·les ne sont pas formé·es. Les référent·es harcèlement violences dont les syndicats ont gagné la création n’ont ni moyens, ni prérogatives définies."

Dans les colonnes de l’Obs en 2021, elle rappelait que "30 % des femmes ont déjà été harcelées sexuellement au travail. Plus de 80 % des entreprises n’ont pas de plan de prévention pour lutter contre ces violences. 70 % des victimes n’en ont jamais parlé à leur supérieur ou à leur employeur."

 

Elle est engagée sur les questions environnementales

Au sein de la direction de la CGT, Sophie Binet était engagée sur les questions environnementales. Avec l’Ugict-CGT, Sophie Binet a lancé durant l’automne 2022 le "Radar travail et environnement", pour aider les salariés et fonctionnaires à "peser sur la transformation écologique de leur entreprise ou collectivité". Le Radar a pour objectif de leur permettre de dresser un état des lieux de la politique environnementale de leur entreprise ou administration, puis d'émettre des propositions sur la base de leur expertise, avant d'interpeller leur direction pour qu'elle les mette en œuvre, selon l’AFP.
Le premier objectif du Radar est "d'ancrer dans l'entreprise le combat environnemental, d'en faire une bataille syndicale quotidienne", selon Sophie Binet, dans la mesure où la question environnementale est "intimement liée au mode de production capitaliste".

 

Elle soutient les lanceurs d’alerte

Sophie Binet est membre du bureau de la Maison des Lanceurs d’Alerte, fondée en 2018. La syndicaliste a signé plusieurs tribunes, notamment pour Le Monde en 2021, pour renforcer les droits des lanceurs d’alerte, améliorer leur protection. Ils permettent de révéler des affaires, comme le scandale du Médiator avec Irène Franchon ou Stéphanie Gibaud, qui a révélé les pratiques de la banque UBS"Sans ces révélations, nombre de scandales financiers, sanitaires ou environnementaux resteraient inconnus du grand public, et les auteurs de ces méfaits, impunis"écrit un collectif.

 

Son visage est presque inconnu du grand public, mais plus pour longtemps. Sophie Binet est la nouvelle secrétaire générale de la CGT, élue lors du 53e congrès de l’organisation est réuni à Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme). C’est une première depuis la création du syndicat en 1895, une femme va prendre les rênes du second syndicat de France. A 41 ans, elle succède à Philippe Martinez, en poste depuis huit ans. Elle s’est imposée devant les favorites Marie Buisson et Céline Verzeletti, dont les propositions ont été rejetées.