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ÇA VA CHAUFFER GRAVE

On aura rarement vu un tel déferlement depuis l’annonce   de l’appel à la grève le 2 janvier. La presse dénonce la   prise d’otages, l’éditorialiste de la Tribune pousse le raisonnement   à son terme et qualifie les syndicalistes de maîtres chanteurs.   Revers de la médaille, la nouvelle s’est répandue comme une traînée   de poudre … on n’avait pas vu ça fin 99 quand 30000 employés de   banque manifestaient dans la rue le 30 novembre pour la convention collective.   Amalgamés avec leurs patrons, les salariés de la profession ont   mauvaise presse : des nantis qui bénéficient de privilèges   et qui refusent de travailler le 1er janvier. Même le ministre   des finances s’y est mis, lui dont on aurait pu penser en sa qualité   de ministre de gauche qu’il apporte un peu de soutien aux personnels. A vrai   dire, ça n’est jamais le bon moment pour faire grève depuis le   11 septembre jusqu’aux prochaines élections. C’est aussi accorder beaucoup   de pouvoir aux syndicats des banques de bloquer le passage à l’euro…    certes le choix de la date est symbolique, mais il reste 30 jours pour négocier,   et le franc aura cours jusqu’au 17 février. Les larmes de crocodile versées   sur les populations fragiles, l’appel à la conscience professionnelle   des banquiers et l’éternel argument du respect de notre clientèle   font bon marché des dégâts que nos clients subissent, et   en premier lieu les moins fortunés, de la dictature du ROE. C’est cette   dictature qui a tout droit conduit aux fermetures d’agences, définitives   celles-là, à la dénonciation de la convention collective   et à ce qu’aujourd’hui toutes les banques s’apprêtent à   franchir un pas supplémentaire avec une organisation du travail destructrice   d’emplois. Hasard malencontreux de calendrier, notre pédégé   avait convoqué la presse pour lui présenter le point sur 4D, probablement   pour briller auprès des analystes … Résultat, il annonce 5 ou   6 CRCm, et une vingtaine de back-offices pour le réseau sans oser lâcher   aux journalistes impatients le nombre d’emplois supprimés ! C’est   plutôt mal parti d’ailleurs du côté du patronat des banques   qui semble jouer la carte du pire. L’AFB qualifie la grève d’irresponsable,   se félicite de voir le personnel travailler d’arrache-pied… et campe   sur son refus. On a vu le DRH de la BNP expliquer à France 2 qu’en matière   salariale, il anticipait, et tous de vanter les 50000 embauches prévues   pour le renfort euro… n’hésitant pas au besoin à mentir en maniant   le double langage, une spécialité, en prétendant ne plus   pouvoir négocier les salaires au niveau de la branche du fait de la nouvelle   convention – faux et d’autant plus faux qu’ils ont refusé de le faire   depuis 1996 – ou bien annoncer des négociations salariales dans les entreprises    … qui n’aboutissent jamais, quand elles existent, à une augmentation   des salaires de base. Du côté syndical, le démarche est   plutôt réfléchie, tirer les conclusions d’un blocage patronal   qui dure depuis 2 ans, laisser encore du temps pour négocier au cas où,   et prendre ses responsabilités en donnant les moyens au personnel de   se faire entendre. Qu’on se le dise, l’occasion est effectivement historique   et elle ne se présentera pas deux fois !

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