Le coup de sifflet final !... ou de départ ?
La consultation du CSE des Services Centraux sur le projet de réorganisation de 8 BU/SU s’est achevée le vendredi 26 avril, après une semaine entière de débats (cf. notre compte rendu). Pour nous, les enjeux du projet portent, non seulement sur le nombre record de 1050 postes supprimés, mais aussi sur le contexte social morose où le groupe SG brille par l’absence de vision stratégique et de relais de croissance à long terme. La surcharge de travail est devenue la première préoccupation des salariés interrogés lors du Baromètre Collaborateur. La mobilité interne grippée pose un sérieux doute sur l’efficacité du dispositif d’accompagnement social du plan proposé par direction. Le volet délocalisation du projet montre de fortes incohérences entre la volonté de Slawomir Krupa de bâtir des processus efficaces et la délocalisation du service le Fil RH.
Le travail des experts de SECAFI a permis, lors des consultations, de confirmer la pertinence des alertes que nous avions remontées dès la publication du projet. Car malgré une compréhension des objectifs de réduction de coûts recherchés, les experts de SECAFI ont mis en évidence les limites et obstacles du projet (cf. le rapport d’expertise) : Projet uniquement motivé par la réduction de coûts sans vision stratégique ; Précipitation et impréparation de la déclinaison opérationnelle de l’objectif financier dans les BU/SU ; Lacunes du dispositif d’accompagnement ; Délocalisations des activités clés pour la banque avec risques de perte d’expertise ; L’absence du suivi effectif de la charge de travail… C’est donc sans surprise que nous avons voté contre ce projet, vous trouverez ici, notre motivation de vote.
Avec cette consultation, la direction a donné le coup de sifflet final aux discussions. Et malgré un vote unanimement contre, la direction va pouvoir procéder à la mise en œuvre du projet avec l’envoi du courrier aux salariés concernés par des suppressions de poste au début du mois de mai. A la CGT, nous sommes organisés pour accompagner individuellement l’ensemble des salariés dès la mise en œuvre du projet, tout en gardant l’intérêt général comme axe de défense dans cette bataille qui aura duré 4 mois
La précipitation
Après plusieurs semaines de « rumeurs » dans différentes presses économiques, la direction nous a remis, le 5 février, un dossier de réorganisation de 700 pages concernant 8 BU/SU ayant un impact social conséquent avec la suppression de 946 postes dans les Services Centraux Parisiens (-288 RESG, -185 GBSU, -182 SGRF, -84 GLBA, -77 DFIN, -73 AFMO-EURO, -57 HRCO). A la lecture du dossier, nous avions immédiatement alerté les salariés et la direction sur : L’absence de vision stratégique accompagnant ce énième projet de réduction des coûts ; la précipitation déraisonnable du calendrier de la consultation et de sa mise en œuvre ; l’insuffisance du dispositif d’accompagnement reposant principalement sur la mobilité en interne déjà en souffrance ; les délocalisations des activités sensibles avec des risques opérationnels et de pertes de compétences élevés ; la nécessité d’un pilotage fin de la surcharge de travail, existante et induite par le projet. Par conséquent, nous avons réclamé la suspension du projet et l’ouverture immédiate des concertations avec les organisations syndicales pour que la direction nous clarifie le positionnement du projet dans une vision stratégique à long terme ; Définir un dispositif de reclassement transverse effectif avec un suivi efficace de la charge de travail ; Réaliser une revue des activités délocalisées dans le cadre du projet et le maintien du service le Fil RH en France.
Dès le 7 février nous avons organisé des échanges collectifs avec les salariés concernés par la réorganisation pour partager nos analyses et nos positions sur le projet. Ce sont plus de 1000 salariés qui se sont connectés aux différentes réunions tenues entre le 7 février et le 12 février. Nous avons également reçu plusieurs centaines de salariés individuellement, répartis sur l’ensemble des BU/SU concernées, pour prendre connaissance de leur situation, leurs besoins et préoccupations.
Parallèlement nous avons proposé aux autres syndicats de faire bloc pour réclamer à la direction des concertations préalables sur les composantes stratégiques du projet, sur la nécessité de repenser le dispositif d’accompagnement, sur la délocalisation inconsidérée du Fil RH et sur le calendrier déraisonnable que la direction voulait imposer pour traiter ce projet. Nous n’avons pas obtenu de retour des autres syndicats. Seul le SNB estimait qu’il fallait respecter le timing serré par la direction au motif que « le temps est anxiogène ». Habituellement dans de pareils cas, on conseille aux personnes qui doivent faire face à une situation compliquée et malheureuse de faire le nécessaire pour l’éviter et de l’affronter si l’évitement est impossible. Il est rare d’entendre que le meilleur moyen d’y faire face serait de faire en sorte qu’elle arrive au plus vite.
C’est donc seuls mais bien préparés et déterminés que nous sommes rentrés dans le CSE marathon des 19 et 20 février. Pendant ces deux journées de CSE nous avons déployé toute notre énergie pour relayer les problématiques remontées par les salariés et pour convaincre la direction de la nécessité de ralentir et de prendre le temps nécessaire de repenser le dispositif d’accompagnement et le suivi de la charge du travail. Nous avons également rappelé les règles qui encadrent les transferts de postes.
Nous avons chargé les experts SECAFI présents pendant ces deux journées d’étendre leurs études des impacts économiques et sociaux à la mise en place d’un indicateur de surcharge de travail pendant toute la durée de mise en œuvre du projet.
[Vous trouverez ici les comptes rendus des séances du CSE des 19 et 20 février.]
L’épicentre
Une semaine après la remise du dossier de 700 pages aux élus du CSE des services centraux parisiens, la direction conviait les organisations syndicales représentatives à une première réunion de négociations de l’accord d’accompagnement. En déclaration préalable, nous avons contesté fermement le manque de temps nécessaire pour aborder l’ensemble des sujets du dossier qui vise à supprimer plus de 1000 postes dans 8 BU/SU et nous avons jugé déraisonnable et inacceptable la volonté de la direction de clore le dossier en 2 séances de CSE. Nous avons exigé l’ouverture de discussions préalables sur la stratégie et un dispositif robuste d’accompagnement transversal aux BU/SU, piloté en interne et localisé à Paris. Enfin, nous avons exigé le renoncement de la délocalisation du Fil RH. Nous avons rappelé que ces points étaient essentiels et constituaient, pour nous, les lignes rouges à ne pas franchir. Une fois de plus, nous étions seuls sur ces positions.
Pendant 5 séances de négociations intenses, nous avons défendu bec et ongles les 100 points du cahier des charge que nous avions constitués à la sortie des rencontres avec les salariés en février et mars. Chaque réunion était dédiée à des thèmes divers, 12 février : Réunion de cadrage, 26 février : Le reclassement, 4 mars : La délocalisation, 11 mars, 15 mars : Les mesures spécifiques de départ ! Nous avons pris un soin particulier pour préparer ces séances en communicant les points négociés et en prenant en compte les retours des salariés. A la sortie de chaque séance, nous avons réalisé un compte rendu détaillé afin que chacun puisse suivre l’avancée des négociations et noter les points en suspens (Les compte rendu des négociations : 12 février : ouverture du bal, 26 février : le reclassement , 4 mars : Bugalore, 11 mars, 15 mars : tous concernés ! )
Le 16 mars, la direction a remis aux organisations syndicales la version finale de l’accord pour signature. Nous notons des avancés de l’accord avec le dispositif de rachat des trimestres, la revalorisation salariale des TA, CFC et MST. La direction versera à la mutuelle 1 200 €/an pour chaque départ suivi de la portabilité. Nous avons fait inscrire la possibilité pour les SDC TMB de postuler sur les postes cadres.
Mais avec cette version, la direction n’a pas tenu compte de nos alertes sur les points essentiels :
Un dispositif d’accompagnement bancal mais annoncé comme renforcé ; HRCO/MET, la direction de métiers qui pilote le plan subit 9 suppressions de postes ; les reclassements sont gérés par un prestataire comme nous le craignions ; la direction maintient la délocalisation du Fil RH dont l’utilité et la connaissance de la législation sociale ne sont plus à démontrer ; les indemnités de départ sont rabotées avec l’intégration des variables/bonus à partir de 10 ans au lieu de 5 ans comme sur les derniers accords ; l’absence du suivi des charges de travail.
Nous avons donc lancé une consultation des salariés : faut-il signer ou non l’accord ? Les résultats sont très nets en faveur de la non-signature, à 87%.
Le 27 mars l’accord a été signé par la CFDT et le SNB. Pendant toute la période de négociation, nous avons déploré l’absence de position commune des différents syndicats, tous nos appels à une réunion intersyndicale afin de consolider nos positions sont restés sans retours. Le SNB a poussé le bouchon un peu plus loin en faisant payer l’expertise indispensable sur le sujet par le CSE (non par la direction).
Le théâtre
L’analyse du contexte et des risques, ainsi que les échanges collectifs ou individuels sur le projet dès le début du mois de février, nous ont permis de construire nos interventions lors des CSE et nos revendications lors des séances de négociation. Rappelons que dans de telles réorganisations, l’accord concentre en lui-seul le cadre qui fournit l’ensemble des règles encadrant la mise en œuvre. Tout ce qui n’est pas dans l’accord n’est pas opposable à l’entreprise. Nous avons sans cesse rappeler le rôle primordial et le caractère contraignant de l’accord qui diffère de la simple information du CSE (qui reste une phase indispensable pour la compréhension du dossier).
C’est pour cette raison que nous avons provoqué les discussions avec les salariés, puis nous avons porté leurs préoccupations et leurs interrogations au CSE en février et enfin nous avons défendu leur position avec les revendications et propositions à chaque séance de négociation en mars.
Les autres organisations syndicales ont préféré une autre méthode. Elles ont attendu les premières séances du CSE en février, pour demander à la direction d’organiser des commissions économiques pour rencontrer les salariés. Résultat, les commissions ont lieu début mars pour 2 SU (GBSU et DFIN, 7 et 8 mars) et fin mars/début d’avril pour les 6 autres BU/BU. Pendant toute la période de la négociation, qui va du 12 février au 15 mars, une faible partie des salariés a été rencontrée. Nous avons du mal à déceler la logique d’une telle méthode qui néglige la phase préparatoire qui consiste à la co-construction de revendications dans la négociation de l’accord, dont le rôle est pourtant essentiel dans de telles situations. Privilégier uniquement la phase dialogue pendant les CSE comportent des risques. Nous rappelons que si les échanges d’informations avec la direction lors des CSE sont indispensables pour la compréhension du dossier, ils ne doivent pas constituer un but en soi car ils leur manquent le caractère contraignant qu’impose à la direction un accord pour la mise en œuvre du projet.