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Charge de travail & droit à la déconnexion - 9 Juin 2022


La 3ème réunion de négociation sur la qualité de vie et des conditions de travail (QVCT) s’est déroulée le 9 juin 2020.

Cette 3ème réunion se déroulait, bizarrement, en même temps que l’examen de la première vague opérationnelle du projet vision 2025 de fusion avec le CDN (avec près de 900 suppressions de postes en 2023). Ce qui rendait la scène pour le moins surréaliste.     
Si l’on ajoute que la direction veut supprimer - en plus - les instances représentatives locales qui ont une vertu préventive en termes de qualité de vie et de conditions de travail, on entre alors dans la 3ème dimension.

Quoiqu’il en soit, la direction a prévenu qu’elle enverrait certainement un projet de texte, après cette réunion qui devait traiter de «la charge de travail» et du «droit à la déconnexion». Tout en précisant qu’elle voulait reprendre les définitions de l’Anact pour «savoir de quoi on parle pour savoir ce qu'on va faire derrière».

La charge de travail : en mode Run[1] ou Change
Alors que le débat s’enlisait entre, d’un côté, les comparaisons des différentes définitions de la charge de travail (prescrite, réelle, ressentie) et de l’autre, les dérives d’un système d’évaluation dont le caractère purement scolaire ne permet justement pas une réelle prise en compte de la charge de travail, nous avons rappelé pour la CGT qu’il n’est pas question de maintenir la confusion actuelle sur ces sujets. D’autant qu’en laissant cette confusion dans un accord signé par les syndicats, la direction inverse les responsabilités.


Ce n’est pas le salarié, ni son manager qui sont responsables des coupes sombres dans les effectifs (qui génèrent parfois une explosion de la charge de travail).

Nous avons proposé qu’à l’occasion de la présentation de nouvelles réorganisations, des indicateurs soient partagés avec les élus. Il faut définir un dispositif qui permette de définir la charge de travail engendrée et mesurer son évolution dans le cadre des réorganisations (entre le point A et le point B). Faute de quoi et sans dispositif précis, on ne peut pas espérer  «changer la culture», comme le propose la direction. Au mieux, on resterait dans l’incantation.

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La direction met aussi en avant «la possibilité de renoncement» qu’aurait un salarié en cas de difficulté et propose d’échanger sur le sujet. Là encore, il nous semble que la direction inverse les responsabilités : c’est à la ligne managériale de définir les priorités, les sujets à mettre de côté lorsqu’il y a un manque d’effectifs et une surcharge de travail. On ne peut pas demander sérieusement à un salarié d’aller voir son manager pour lui dire qu’il « renonce à faire telle ou telle tâche, faute de moyens ». Sauf à le mettre en risque de licenciement pour insuffisance professionnelle (Art. 26 de la convention collective). Comme nous ne pouvons pas laisser des salariés dans une situation de souffrance, il est de la responsabilité de la direction de lui donner les moyens (en effectif, en formation, en directives claires, etc.) de pouvoir bien faire son travail.


La direction va tenter de définir un dispositif qui permettrait d’examiner au fil de l’année, l’évolution de la charge de travail (en tenant compte des effectifs, des compétences, du temps nécessaire pour y arriver) pour promouvoir la culture du dialogue.

Pour la CGT, cela reste difficilement compatible si on maintient le système d’évaluation actuel (qui favorise la bâtonnite, plutôt que les échanges réguliers). Nous avions précédemment demandé a supprimer les niveaux de classements dans les évaluations, justement pour favoriser la discussion (plutôt que la « notation »). 

De même, nous avons refusé la fausse bonne idée qu’un salarié ait la responsabilité de « discuter » de ses objectifs en début d’année. Le dispositif interne prévoit au contraire que la direction garde la responsabilité de fixer des objectifs SMART (Spécifiques, Mesurables, Accessibles, Réalistes, mesurables dans le Temps). Si le salarié juge que ses objectifs ne sont pas SMART, il a alors la possibilité de faire un recours auprès de son N+2 ou 3 (ou la RH), accompagné d’un représentant du personnel. Le souci, c’est qu’au fil du temps, tout le monde s’est assis sur ces principes et qu’il faut parfois monter très haut pour obtenir la moindre modification dans les évaluations. La ligne RH, qui devrait être la gardienne du temple concernant ces principes, a trop souvent choisi le mauvais camps et (très souvent débordée) n'a pas fait respecter les engagements inscrits dans l’accord signé par la direction (et l’instruction 13672).

Il nous semble dès lors préférable de faire appliquer ses principes, avant d’envisager de réinventer la roue, de perdre du temps à trouver la recette de l’eau chaude. Il faut avoir une logique d'échange loyal entre les acteurs, permettant de suivre l'évolution de la charge de travail pour pouvoir la réguler sans que la discussion soit entachée de connotation négative pour l’évalué.

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Il est certain qu’en optant pour le statu quo, la direction pourrait faire toutes les conférences sur « la souffrance au travail » en amphi à la Défense ou des séminaires au Futuroscope de Poitiers, cela n'aura aucun impact sur le ressenti des salariés – et encore moins sur leur réelle qualité de vie et leurs conditions de travail.

Polémique :
Par fausse naïveté (ou par nécessité), la direction a mis en avant que « dans le projet vision2025, on a commencé à mettre des briques ».
CGT : « vous rigolez ? C'est quoi vos briques ? … C’est plutôt un pavé qui consiste à supprimer des centaines de postes, les IRP locales, tout en augmentant  les métriques ».

Nous avons rappelé que cela faisait maintenant 2 ans qu'on tente d'expliquer que Vision 2025 ne pourra pas fonctionner avec 3700 postes en moins, tout en montant en compétence et augmentant les portefeuilles. Ce n'est pas une question de « culture » ! C’est une question de choix stratégique et de moyens.

Idem, quand dans les services centraux, le conseil d'administration a décidé de faire 500 millions d'économies supplémentaires, ça c'est traduit pas 700 suppressions de postes, sans « culture du dialogue entre manager et collaborateur », et encore moins, en termes de qualité de vie et de conditions de travail.

La direction a ensuite tenter de nous vendre l’ «appui d’un cabinet conseil» sur le sujet, avant de revenir avec une proposition d’expérimentations qui pourraient être faites lors des prochaines réorganisations.

Pour la CGT, tout ceci n’aurait pas beaucoup de sens si, en parallèle, elle maintient sa volonté de supprimer les IRP locales qui permettent un suivi à taille humaine.

D’ailleurs, la médecine du travail interne l’a confirmé: « La charge de travail, c'est le problème de fond, mais nous n'avons pas de solution miracle. Nous faisons de la prévention tertiaire… quand un collaborateur ne va pas bien. Je préfèrerais faire de la prévention primaire.  Il ne faut pas mettre tout sur le dos des managers, ils manquent de moyens. La situation ne s'améliore pas. Les réorganisations ont empiré les choses. ».

Tout en précisant : « il ne faut pas confondre la charge de travail et les objectifs. Le problèmen’est pas qu’individuel, il est aussi collectif. Il faut que la charge soit examinée au-dessus du management de proximité. Sur les réorganisations, il faut examiner les impacts humains très en amont. Pas quand les choses sont décidées… ».

Le droit à la déconnexion et l’hyperconnexion :
Le sujet est en lui-même chronophage. On pourrait en parler des heures… et empiler des tonnes de constats. CFDT, CFTC et SNB ont plaidé pour un « pop up » qui signalerait qu’il est temps de se déconnecter. A contrario, nous avons mis en avant que les bouleversements du monde du travail sont tellement considérables par le télétravail et les nouveaux outils (plus ou moins intrusifs) qu’un pop up ne servirait pas à grand-chose, à part augmenter les difficultés informatiques.

De nouveaux outils sont mis en place régulièrement. Certains simplifient la vie, mais il faut parfois « donner la main à l'entreprise » sur nos propres téléphones pour pouvoir continuer à recevoir nos mails. C’est le cas actuellement avec Nova mobile 2…

Ces outils ont aussi des conséquences (positives ou négatives) sur nos vies.
(cf l'article des Echos sur Whatsapp)

Compte tenu de ces évolutions historiques, nous avons proposé de « redonner la parole aux salariés » pour savoir « comment ils vivent ces évolutions ». Le droit à la déconnexion est il possible ? Ou pas ? Quelles difficultés rencontrées ? Sont-ce des problèmes techniques ? managériaux ? etc.

Des réponses des salariés à ces questions, viendront ensuite la nécessité de modifier nos processus et d’apporter des réponses concrètes. Loin des incantations de l’accord échu.

Nous avons rappelé à la direction qu’il fallait qu’elle renonce aussi aux affichages idéologiques de l’accord précédent («dès lors qu’un salarié répond à un mail en dehors des horaires, ce n’est pas du temps de travail » par exemple).

Pour la direction, il faut clarifier aussi les choses sur certains outils, type groupes Whatsapp pour éviter des dérives (encadrement horaires, gestion des exclusions du groupe, de l’inclusion de l’ensemble des concernés ou pas, en terme de contenu aussi). « Cela ne doit pas devenir un outil professionnel » (mais pour autant il ne doit pas avoir des éléments professionnels d’échangés sur les groupes WhatsApp) et garder son aspect convivial (sans dérives types comportements inappropriés).« On a un truc à écrire sur le sujet dans l’accord QVCT »

Comme la direction semblait tergiverser sur la mise en place d’un pop up sur le poste de travail, nous avons prévenu que nous n’accepterons pas l’installation d’un flicage sur les postes de travail (qui reste la condition pour qu’un pop up s’active…). A suivre.

Avant de conclure la réunion, au bout de 4 heures, la direction est convenue qu’«il faut effectivement redonner la parole aux salariés pour écouter et progresser sur nos outils et dispositifs ». Mais alors qu’elle proposait de réactualiser la charte et que la CFDT proposait de l’annexer à l’accord, nous avons refusé et précisé que nous pouvions rappeler des principes dans l'accord mais qu’on ne va pas inventer des règles qui sont vécues différemment.

La prochaine réunion est prévue le 20 juin (sur les RPS) et cette négociation devrait certainement reprendre ensuite à la rentrée.



[1] La charge de travail quotidienne, au fil de l’eau …. Et celle issue de réorganisation (change).