Cadre ... à une poignée de main du boss - 13 Mars 2024 |
Après les plans de réorganisations Visions 2025, Ithaque, Mikado, Tangram, Homère, Pléiade … et maintenant, Athena :
... DE CHARYBDE EN SCYLLA
La CGT-SG : En préparant notre échange, nous n’avons pas convenu de thème spécifique. Quelle est ta perception de la transition Frédéric Oudéa - Slawomir Krupa et ce qui t’a le plus marqué depuis l’arrivée du nouveau PDG en 2023. Cassandra : Ça fait plus de 20 ans que je suis à la Société Générale. J'avais fait de l'intérim avant mais c’était mon premier CDI. J'ai alors eu la chance et la malchance de connaître les bonnes années qui précédaient l’affaire Kerviel et puis les suivantes. Il y a «un avant» et «un après» Kerviel. Depuis, j'ai l'impression d'être sur une pente descendante qui ne s’arrête jamais. Et à tous les niveaux : des conditions de travail jusqu’à la rémunération. Ensuite toutes ces petites choses comme la dégradation de la cantine, la qualité des blocs notes et des stylos, l’entretien des toilettes, etc .… Enfin, c'est la dégradation de toutes ces petites choses qui, cumulées ensemble, font que j’ai vraiment l'impression de travailler dans une boîte qui meurt à petit feu, et surtout on ne voit pas quand cela va s'arrêter, ni comment. L’arrivée du nouveau DG n’a pas permis de rompre avec cette situation et d’amorcer un virage vers une issue positive. C’est pour l’instant, un comme un rendez-vous loupé. C’est ce constat que je voulais partager. En 2022/2023, quand on a su que F. Oudéa allait partir et qu'on ne connaissait pas encore le nom du nouveau DG, à titre personnel, j'espérais, à la limite, que ça soit quelqu'un de l'extérieur pour casser le cycle infernal dans lequel on se trouvait. J’espérais un véritable renouveau avec un «Outsider» qui rompt avec ces 15 dernières années, qui nous motive, qui soit super punchy et qui nous dise un truc du genre : «C’a été dur, mais maintenant on va y aller et on va tout déchirer !». Une personne que tu as envie de suivre, un battant qui te donne envie d’assurer. Jusqu’à présent, c’est la grosse déception ! c’est la même logique de gouvernance que l’ancien DG. Tant qu'il n’était pas à la manette, je me disais qu’il aurait peut-être de bonnes idées. Il avait peut-être suffisamment d’énergie et de vison pour nous motiver, mais cela fait presqu’un an et c’est la désillusion. Pour le moment je ne vois rien d’autre que des mesures pour réduire les coûts. Pour moi, c’est un mauvais message envoyé aux salariés qui attendent une rupture et qui ne voient que la continuité de l’ère Oudéa et des cost Killers. Le problème c’est qu’il y a eu de nombreux plans de réductions de coûts sans pour autant avoir constaté un bénéfice pour les salariés restants (action en berne, image de l’entreprise dégradée en interne et en externe …). Les réductions de coûts sont d’abord celles réalisées sur de l'humain. La Société Générale est une entreprise de services donc c'est essentiellement de l'humain, directement ou indirectement. Directement lorsqu’on supprime des postes ou indirectement comme lorsqu’ils ont réduit l’investissement via les outils IT. De mon point de vue, je passe trop de temps à comprendre la source des données que les données en elles-mêmes. Il faut réinvestir dans la qualité des données en amont pour améliorer la qualité des analyses. Donc il y a un souci, car avec une politique basée uniquement sur la réduction des coûts comme on le voit à la SG depuis des années, in fine, je dis bien in fine, la qualité du travail est de plus en plus dégradée, soit en raison d’un manque de motivation (lié à l’absence de revalorisation salariale) soit en raison du manque de performance des outils mis à notre disposition. Je ne vois pas l'intérêt d’en arriver là. [Depuis l’interview, les réorganisations de RESG et de DFIN – notamment - ont été présentées : cf ici] A force de réduire les équipes opérationnelles, j'ai l'impression qu'on est dans une pyramide inversée. Normalement, une pyramide est constituée d’une base large et solide. Dans l’entreprise, c’est ce socle qui est constitué de centaines et milliers d’opérationnels travaillant chaque jour. Avec tous ces plans depuis plus de 10 ans, la direction ne cesse de grignoter cette base. En revanche, ceux qui sont en haut de cette pyramide sont bien installés ; eux ils restent mais concrètement ils ne font pas de production. Dans ma vision, à terme cela ne tient plus, et l’entreprise se fissure. Au-delà des mauvaises conditions de travail, nous subissons en tant que salariés de la Société Générale, une très mauvaise image depuis l’affaire Kerviel. Et ça ne nous aide pas ! REDONNER ... DU SENS Cassandra : En interne aussi, l’image a été aussi bien abîmée. Je pense qu’on n’a plus cette fierté de travailler à la Société Générale. Pour ma part, j'ai l'impression de faire du taylorisme, de travailler sur une chaîne d'usine. Chacun a sa micro tâche. Et dès qu'il y a un souci sur la chaîne, personne ne sait à qui s'adresser. Parce qu’entre les délocalisations à Bangalore, à Bucarest ou n'importe où ailleurs et l’absence de vue d’ensemble, on est complètement déboussolés, lorsque la chaîne s’enraye. Il faut parfois aller « toquer physiquement à une porte » pour régler certains problèmes. Mais quand l’activité est à Bangalore ou Bucarest, et que tu ne connais même pas le nom de la personne, tu as juste une boite mail générique, là, t’es un peu coincé. Dans ce genre de situation, personne ne se sent vraiment responsable du problème donc personne ne le prend en charge et, tu restes avec ton problème non réglé ou partiellement réglé.
Cassandra : C’est une grande question et je ne m'y connais pas assez pour donner une vision construite. Néanmoins, je constate que depuis plusieurs années l’organisation est tournée vers le déclin et non vers une stratégie de conquête (comme par exemple la vente de LYXOR qui était, pour moi, un joli fleuron). J'ai l'impression qu'on est en train de « déshabiller » totalement l’entreprise. Soi-disant, « nous nous recentrons sur notre cœur de métiers ». ... DES LIMITES Cassandra : Les activités de SG sont composées de la finance de marché, du réseau bancaire France et à l’internationale. Toutes ces activités ont connu des contractions importantes à travers des multiples réorganisations et des désengagements dont les derniers en date concernent nos activités bancaires en Afrique. Mais en même temps, on a aussi connu des investissements importants comme l’acquisition de LEASEPLAN... C’est à dire dans le secteur de la voiture ! Mais on n’est pas Peugeot. Demain, on va investir dans quoi ? … La direction nous parle de nos cœurs de métiers mais je ne comprends pas en quoi l’acquisition de LEASEPLAN est au cœur de notre métier de banquier. INCARNER L’AVENIR CGT-SG : Tout à l’heure tu exprimais ton envie d’un leader avec un vrai projet à la tête de la SG. Notre nouveau PDG, s’est-il réellement présenté aux salariés ? Je n’en ai pas le souvenir. Présenter en tant que personne, je veux dire. Il a présenté sa vision de l'entreprise. Mais il nous manque un « storyboard », un truc en plus sur sa personnalité (des soft skills) qui nous donne envie de le suivre. A ce niveau-là, il faut être capable de motiver ses troupes ! Je me compare souvent à un soldat qu'on envoie au front, il faut me donner de bons arguments pour que je me batte à fond.
Cassandra : Avant Kerviel, les salariés avaient des augmentations systématiques tous les ans. Tu avais des grandes soirées organisées pour les salariés. On avait pas mal d’occasions pour passer de bons moments entre collègues, des petits déjeuners improvisés, la galette, et des tas de petits événements… Des petites choses de la vie qui soudent une équipe. Bien entendu, cela coïncidait avec une période de croissance importante de l’entreprise. On avait une véritable émulsion dans la banque avec une multitude de projets de développement. On se sentait un peu les rois du monde. Peut-être un peu trop alors … On avait une véritable envie de croissance, une envie de gagner de l'argent. Nous n’étions pas en mode survie comme aujourd’hui. Puis il y a eu l'affaire Kerviel. Dans un premier temps, il a fallu absorber le choc d’une extrême violence. Ensuite, plus le temps a passé, plus j’avais cette impression que l’on n'arrivait pas à se relever ; comme un boxeur qui s’est pris une bonne droite. Cette droite qui t’envoie au tapis et même si tu te relèves, tu continues de chanceler et tu continues de prendre des coups … PRÉPARER L’AVENIR CGT-SG : L’ image semble pertinente, celle de la SG en boxeur chancelant, les coups reçus symbolisés par les plans sociaux et les cours de bourse en tant qu’indicateur de santé. Je voudrais qu’on aborde la question des rémunérations, comment vois-tu l’évolution de ces dernières années ? Que faire pour faire corriger cette situation ? La RH te fait comprendre que si tu n’es pas content tu peux partir. Mais les 150 000 salariés de la SG ne peuvent pas s’en aller d’un coup. Le groupe SG n’investit pas sur ceux qui connaissent bien l’entreprise. C’est pourtant eux qui comprennent le mieux le système d’information et les rouages de fonctionnement. Les anciens ont absorbé toute cette complexité multiple au fil des années et c’est ça qui permet un bon fonctionnement. Par ailleurs, il y a aussi la délocalisation et je ne suis pas convaincue que cela a été un réel gain pour l’entreprise : ni en termes d’économie de salaires, ni en termes de productivité. J’ai compris que les salaires avaient explosé en Inde avec un gros turnover (formation de plusieurs mois pour que la personne reste 2 ans max puis rebelote, on forme à nouveau… dans ce contexte la qualité ne peut pas rester stable) ... in fine c’est le client de la SG qui trinque. FINIR “LE JOUR SANS FIN” Aujourd’hui, je suis complètement résignée et niveau personnel, je ne vois pas vraiment de perspective dans cette entreprise. Néanmoins, Il faut être lucide ce n’est pas le bagne ici. Nous sommes en France, dans une grande entreprise... donc même si ça dégrade lentement, on continue à rester. Mais, ma relation avec la SG ressemble un peu à celle d’un vieux couple. On se dit qu’on va faire des efforts et que ça va aller mieux mais en fait, ça ne va pas mieux. Mais tu ne divorces pas pour autant. Il faut parfois un évènement brutal pour qu'il y ait une motivation à vraiment changer/partir. Mais quand ça se dégrade lentement, doucement, alors tu finis par ne plus voir ce délabrement ... ETRE JUSTES VENDRE DU REVE J’aimerai avoir un DG à la Steve Job avec une méga ambition (pas un truc au rabais), un DG qui nous organise un truc monumental (type grosse fête) pour redonner une énergie, une envie, créer une sorte de communion qui rappellerait les valeurs du Groupe (Équipe, Responsabilité).
Il reste jusqu'à lundi 18 Mars 14h00 (fermeture du scrutin) pour faire le choix et le bon ! Sur le site de vote ( https://vote5.slib.com/ca-sg ), vous pourrez voter depuis votre téléphone portable, tablette ou ordinateur personnel et également sur votre laptop nova. En cas de difficultés techniques, de codes oubliés ou perdus, vous pouvez contacter le 0567316710 du 12 au 17 mars (9H00/18h00 - sauf week end) et le 18 mars (jusqu'à 14h00) |
De Charybde en Scylla ( Interview de Cassandra, cadre fidèle et bosseuse ) - 13 Mars 2024
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- Écrit par : Philippe FOURNIL
- Catégorie : d - Emploi
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